La loi LOPPSI 2 a été adoptée, cette semaine, en deuxième lecture à l’Assemblée nationale, à 305 voix contre 187 et avec 8 abstentions. Elle doit maintenant retourner au Sénat pour être adoptée dans les mêmes termes. Malgré son adoption à l’Assemblée nationale, la LOPPSI 2 continue de faire l’objet de nombreuses critiques. Un député explique notamment pourquoi il a refusé de la voter, la blogosphère s’indigne, et la Quadrature du Net réitère ses mises en garde contre la légalisation, l’institutionnalisation et la généralisation de la censure du Net.
En Espagne, le même débat se poursuit, à propos d’une autre loi. Il s’agit de la loi «Sinde» (du nom du ministre qui la porte, Ángeles González-Sinde), dont nous parlions la semaine dernière, et qui a pour objet de combattre le téléchargement illicite(es), par Internet, d’oeuvres protégées par les droits de propriété intellectuelle. De nombreux internautes espagnols s’opposent à cette loi(es), qu’ils voient comme une forme de censure du réseau, et plusieurs sites ont fermé, provisoirement, en signe de protestation. On rappellera que, selon cette loi, l’administration peut exiger des fournisseurs d’accès qu’ils bloquent, et des hébergeurs qu’ils mettent hors ligne, les sites fournissant des liens vers des contenus contrefaisants. Pour le parti socialiste espagnol (PSOE), actuellement au pouvoir, la régulation des téléchargements sur Internet est un enjeu majeur pour l’avenir de la culture(es) (comprendre : pour l’avenir de l’industrie culturelle). Malgré tous ses efforts, le gouvernement espagnol n’a pas réussi à faire adopter la loi Sinde : celle-ci a été rejetée à l’Assemblée nationale (comp. avec la LOPPSI en France), et les câbles diffusés par Wikileaks au début du mois de décembre n’y sont probablement pas pour rien(en) (v. aussi n°36). En dépit de ce premier échec, le gouvernement espagnol persiste et refuse d’abandonner sa loi : le ministre réaffirme la nécessité de son texte(es) et tentera de le faire voter par le Sénat(es).
Aux États-Unis, une fois n’est pas coutume, ce n’est pas le droit de la propriété intellectuelle qui est au centre de l’actualité de la semaine. La FCC a en effet publié(en,pdf) cette semaine des règles pour garantir la neutralité du Net(en) [Format PDF, 1 Mo, 194 pages]. Ces règles ne font pas l’unanimité, loin de là(en). Au sein même de la FCC, les démocrates ont voté pour et les républicains contre(en) (soit 3 voix contre 2). En dehors de la FCC, les positions sont identiques : les républicains s’opposent à toute réglementation de la FCC(en), qu’ils voient comme une ingérence inacceptable du gouvernement dans l’économie. Mais ce sont d’autres voix, celles des défenseurs du principe de neutralité du Net, qui s’élèvent contre la distinction que fait la FCC entre les connexions filiaires et les connexions mobiles (comprendre : avec un smartphone, par le biais du réseau téléphonique). On se souviendra que la même distinction était présente dans la proposition Google/Verizon, et qu’elle avait déjà été durement critiquée. Les fournisseurs d’une connexion filiaire ont ainsi l’obligation d’offrir un accès sans discrimination à tous les contenus, tandis que les fournisseurs d’une connexion mobile n’y sont pas tenus. C’est une des raisons pour lesquelles les partisans de la neutralité du Net critiquent le texte de la FCC(en) : celle-ci aurait élaboré une réglementation a minima, les règles qu’elle propose ne permettant pas de garantir véritablement qu’Internet restera un réseau ouvert. La très importante American Civil Liberties Union (ACLU) est lapidaire : la FCC aurait échoué à protéger la liberté d’expression sur Internet et le caractère ouvert du réseau («the FCC has failed to protect free speech and Internet openness for all users»). Quoi qu’il en soit, la réglementation proposée par la FCC débute bien mal un parcours qui s’annonce être semé d’embûches. En effet, la question de la compétence de la FCC pour imposer aux fournisseurs d’accès des règles d’organisation et de gestion de leur réseau n’est toujours pas tranchée. Les républicains espèrent ainsi que les juridictions annuleront les décisions de la FCC relatives à la neutralité du Net, comme ce fut le cas dans l’affaire Comcast.