L’actualité de la propriété intellectuelle est centrée, une fois de plus cette semaine, sur la loi Hadopi et la taxe pour la copie privée en France, et sur le traité ACTA aux États-Unis. Un groupe de professeurs de droit a en effet adressé une lettre à Obama, très critique à l’égard du traité ACTA, en rappelant notamment le manque de transparence dans les négociations et le fait que le traité doit encore être ratifié par le Sénat américain(en).
Selon le site PCInpact, le système Hadopi connaîtrait un taux de 10% d’échec dans l’identification des internautes. Plusieurs hypothèses permettent d’expliquer les échecs : adresse IP inconnue du FAI (utilisation d’un proxy VPN ?), pas de connexion de l’abonné au moment donné (comment son adresse IP a-t-elle pu être relevée, dans ce cas ?), adresse IP partagée (p. ex., celle d’une borne Wifi publique), adresse IP située dans une plage impossible à identifier (encore plus étrange…), autres erreurs. En outre, l’Hadopi se borne à accepter ou refuser les listes d’adresses IP, sans vérifier ces dernières (tout cela doit être rapide, l’absence de contrôle s’impose donc). Toujours à propos de l’identification des internautes, ArsTechnica avance le chiffre de 25 000 adresses IP(en) envoyées, chaque jour, par les ayants-droit à la haute autorité. Rappelons que les relevés d’adresses IP sont effectués à partir des réseaux de pair-à-pair (P2P), en déclin, tels que Gnutella (Limewire, notamment, qui vient d’être forcé à la fermeture aux États-Unis, sur le fondement de la jurisprudence Grokster(en)), eDonkey (eMule et autres), ou Bittorrent ; ils ne touchent pas les téléchargements directs Web (Rapidshare, Megaupload, etc.) ou Usenet. Par ailleurs, l’on apprend que la Commission européenne aurait débuté une enquête sur la mise en oeuvre de la loi Hadopi.
Concernant la taxe pour la copie privée, l’on apprend que les supports de stockage réseau (NAS) seront désormais taxés. Les supports qui visent exclusivement le milieu professionnel (serveurs) sont toutefois exonérés, ce qui est conforme à l’arrêt Padawan de la CJUE dont nous parlions la semaine dernière. Les premières réactions à l’arrêt Padawan révèlent d’ailleurs, cette semaine, une nette opposition sur son interprétation entre les ayants-droit et les fabricants de matériels de stockage.
Concernant la surveillance du réseau et la tendance sécuritaire actuelle, l’on apprend que les ayants-droit se proncent, aux États-Unis, en faveur du filtrage des sites illicites, et qu’en France, les pharmacies en lignes feront peut être l’objet, dans le futur, de mesures de filtrage à l’instar des sites de paris en ligne.
La surveillance du réseau, c’est aussi la surveillance des internautes. Au Royaume-Uni, la transposition de la directive sur protection des données personnelles fait l’objet d’un recours de la Commission européenne devant la CJUE. Aux États-Unis, un juge réalise qu’on ne peut savoir avec certitude si un internaute est majeur ou s’il est un enfant(en), et remet en cause une loi du Massachusetts sur le fondement du 1er amendement. Par ailleurs, l’Electronic Frontier Foundation (EFF)(en) demande l’abrogation de la directive de 2006, dite «data retention», sur la conservation par les intermédiaires techniques des données de connexion des internautes, qu’elle juge excessivement attentatoire au droit des internautes au respect de leur vie privée.
En France, concernant l’application de la loi pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN) de 2004, un demandeur a été condamné pour avoir assigné l’hébergeur alors que l’éditeur était parfaitement identifiable (principe de subsidiarité). La même décision montre qu’un hébergeur qui refuse de retirer un contenu qu’il ne juge pas «manifestement illicite» agit dans le respect de la loi et de la liberté d’expression.
Enfin, une fois n’est pas coutume, nous sortirons de l’actualité des nouvelles technologies pour conseiller la lecture du blog de maître Eolas concernant l’affaire de l’internaute mis en garde à vue pour avoir envoyé des courriers électroniques grossiers à une députée européenne : l’auteur rappelle notamment que l’article 67 du Code de procédure pénale limite la possibilité de garder à vue aux cas où le délit flagrant est puni d’une peine de prison.