Apple a sorti, il y a quelques temps, la «Mighty Mouse». Ce nom en dit long sur la mentalité Apple (que, pour une fois, je ne peux saluer). Apple a inventé le concept de souris dans les années 80, et d’autres l’ont depuis révolutionné (en première ligne Logitech et Microsoft). Apple a gardé jusqu’à cette année sa souris préhistorique à 1 seul bouton, pour finalement abandonner cette légendaire antiquité pour une souris à deux boutons. Et Apple croit que cela va tout changer. Désolé les amis, c’est trop tard, ça fait longtemps que d’autres vous ont doublé sur ce terrain là. Et la Mighty Mouse n’est pas vraiment une réussite…
<p> Voilà donc la bête. On voit tout de suite qu’elle a gardé la forme caractéristique des souris Apple de ces dernières années. C’est à dire une forme non-ergonomique au possible. La Mighty Mouse tient assez mal dans la main. De ce point de vue, elle présente tout de même la possibilité être utilisée aussi bien par les gauchers que par les droitiers. Et puis elle est très légère et facile à déplacer. Après, c’est une question de goût: je n’ai personnellement jamais aimé les grosses souris, qui certes tiennent bien en main, mais qui sont lourdes et finalement pas très pratiques à déplacer.
On voit également qu’elle a un câble. Mais ce que le dessin ne dit pas, c’est que ce câble est très court. L’avantage certain est qu’il n’encombre pas. Mais d’un autre côté, il vous faudra une rallonge si vous n’avez pas un clavier Apple avec prise USB intégrée (ce qui exclut donc tous les PC). Et si vous avez un Powerbook G4 des débuts, vous devrez brancher la Mighty Mouse sur le port USB de droite (c’est-à-dire le port USB 2), car le fil n’est pas assez long pour atteindre le port de gauche (c’est-à-dire le port USB 1). Elle monopolise donc le seul port USB 2 de votre ordinateur, et laisse libre le port USB 1… incohérent !
Ensuite, les boutons. On les voit sur l’image: il y en a deux. Le premier est la coque elle-même, et le second se trouve sur les côtés, de part et d’autre de la souris. Ce sont les deux boutons matériels. Il y a ensuite des boutons virtuels: si vous pressez la coque du côté gauche, ça fera l’effet d’un clic sur le bouton gauche ; si vous pressez la coque du côté droit, ça fera l’effet d’un clic sur le bouton droit ; si vous pressez la coque au milieu, ça fera l’effet d’un clic sur la molette.
Le système fonctionne mal. En effet, le clic droit ne fonctionne que s’il n’y a aucun doigt posé sur le côté gauche de la souris. Je dis bien «posé». A partir du moment où votre index est en contact avec le côté gauche de la souris, même s’il ne fait que l’effleurer, le clic droit devient impossible. Pour cliquer-droit, il faut donc impérativement relever l’index. Croyez-moi, il faut le temps de s’y faire… Ce n’est pas très habile de la part d’Apple, mais c’est clairement voulu: Apple considère toujours que le clic gauche est prééminent, et que le clic droit n’est qu’accessoire. C’est vrai dans la plupart des cas, mais pas dans tous. Par exemple, quelqu’un dont la principale activité informatique consisterait à taper des texte sous Word, ou un autre traitement de texte, utiliserait plus souvent le clic droit (menu contextuel pour la correction des fautes de frappe) que le bouton gauche (positionnement du curseur dans le texte), car tout ce à quoi sert ce dernier peut également se faire avec des raccourcis clavier.
Le bouton du milieu est inutilisable, et ce pour une raison très simple: il faut bouger la main pour y accéder, car la sensibilité des boutons gauche et droit impose un positionnement de la main très précis. Bouger la main, c’est trop long. Et puis, on n’a pas ce réflexe. Avec toutes les autres souris, on doit bouger l’index pour accéder au bouton du milieu, pas la main. Le bouton latéral (il y en a matériellement deux, mais un seul du point de vue du logiciel) est également très difficile d’accès, pour la même raison que celle invoquée pour le bouton du milieu. En plus, il faut appuyer comme un damné pour que le clic soit pris en compte.
<p> La molette est assez agréable, du moins au début. Elle permet le défilement dans tous les sens. C’est-à-dire aussi bien vertical qu’horizontal, et donc également en diagonale. C’est génial, mais totalement inutile. Quand le défilement horizontal est-il vraiment nécessaire ? Jamais… ou presque. Sur internet ? S’il doit être utilisé, c’est que le webmaster s’est planté et que la résolution du site ne convient pas. En retouche d’image ? Non, définitivement si l’on «zoom» sur une image pour en corriger les détails, on placera la zone à corriger au centre de l’écran, cela coule de source. Pour les gros tableaux Excel avec une multitude de colonnes ? Oui, peut être. En tout cas, si vous utilisez Firefox, le défilement horizontal fera l’effet de pulsions sur les boutons «Précédent» et «Suivant», ce qui est particulièrement pénible. En effet, vous rédigez un long texte dans un formulaire, vous attrapez votre souris pour cliquer sur le bouton «Envoyer» et touchez la molette -ultrasensible, du reste- par mégarde, et en un instant vous perdez tout votre travail. La première fois, j’ai pas trop apprécié…
Dernière chose concernant la molette: elle a tendance a ne plus très bien fonctionner quand elle est sale. Le défilement vers le haut fonctionne très mal sur ma Mighty Mouse depuis quelques jours, car le firmware de la souris ne le reconnaît que par à-coups (voir plus bas pour des explications sur ce point).
Quant au capteur de la souris, il n’est pas très précis. Il n’est certes pas mauvais, mais il ne vaut pas le capteur Laser des nouvelles souris haut de gamme Logitech. Pour 55 euro, on aurait aimé avoir du haut de gamme, surtout de la part d’Apple ! Cependant, ce capteur a un point fort, il fonctionne très bien sur les surfaces réfléchissantes noires: là où le capteur infrarouge de ma vieille Logitech devient fou, celui de la Mighty Mouse ne bronche pas. Il fonctionne aussi parfaitement sur les surfaces qui ne sont pas totalement lisses, comme les Bulgomme ou les nappes avec molletonnées.
<p> Cette souris est étrange d’un autre point de vue: son firmware. Le firmware est ce qui fait le lien entre le matériel (hardware) et le logiciel (software). Par exemple, la Mighty Mouse contient un haut parleur interne qui produit le bruit caractéristique d’un clic lorsque l’on utilise le bouton latéral, et le bruit caractéristique d’un défilement de molette lorsque l’on utilise la molette. Essayez: débranchez la souris, cliquez et défilez, et vous n’obtiendrez aucun bruit ; rebranchez-la et réessayez.
Tout cela est géré par le firmware. Ce firmware gère également le comportement et la sensibilité des boutons. On dit -et moi y compris, ci-dessus- que les boutons latéraux sont très durs à actionner, car il faut appuyer très fort. En fait, ces boutons sont très sensibles, mais le firmware ne considère qu’il y a un clic qu’à partir d’une certaine pression. C’est très étrange, et j’étais loin de me douter qu’un tel montage existait jusqu’à ce que ma souris se mette à «déconner». En effet, un jour, elle s’est déréglée (ça, c’est encore plus étrange…) et les boutons latéraux sont devenus ultra-sensibles. Il suffisait des les effleurer pour qu’ils s’actionnent. Moi qui leur avait assigné l’affichage par Exposé de toutes les fenêtre, et qui étais habitué à leur manque de réactivité, j’ai passé un mauvais quart d’heure avec des fenêtres à l’écran qui devenaient folles. J’ai débranché et rebranché la souris, et tout est rentré dans l’ordre. Cet exemple montre bien que la «dureté» du bouton latéral n’est pas un fait de la souris elle-même, mais de son paramétrage interne.
J’aimerais maintenant parler un peu de la gestion logicielle, par Mac OS X, du pointeur. J’ai toujours pensé que les souris sur Mac étaient «lentes» et peu réactives. Et c’est vrai: c’est un problème d’accélération du pointeur. Malheureusement, les drivers fournis par Apple ne permettent pas de modifier cela. Faites un test: branchez la Mighty Mouse, ou toute autre souris Apple, réglez la vitesse du pointeur dans les Préférences Système de manière à ce qu’il soit assez rapide pour être raisonnablement utilisé (vous le règlerez à coup sûr sur une des vitesses les plus rapides) ; puis, branchez une souris Logitech ou Microsoft sans changer ce réglage. La nouvelle souris Logitech ou Microsoft sera totalement inutilisable: le curseur sera bien trop rapide et imprécis, et vous devrez retourner dans les Préférences système pour abaisser la vitesse. Pour pallier à ce problème inhérent aux souris Apple et aux limitations de Mac OS X, il vous faudra recourir à un utilitaire tierce-partie, comme MouseZoom. MouseZoom est léger et gratuit. Il s’agit d’un utilitaire qui se greffe aux Préférences système sous la forme d’un panneaux de préférences (PrefPane), et qui permet de régler l’accélération du pointeur de 1 à 10, là où la vitesse maximale de Mac OS X est 3. Il existe d’autres utilitaires du genre, comme SteerMouse, mais ils sont payants.
En outre, le logiciel livré avec la Mighty Mouse (qui permet de paramétrer le défilement de la molette et les actions associées au bouton latéral) n’est compatible qu’avec Tiger. Les utilisateurs de Panther pourront utiliser la Mighty Mouse, car elle est automatiquement reconnue par le système, mais n’auront pas accès à ces paramétrages avancés. Je vous conseille également de mettre le CD livré avec la Mighty Mouse de côté… en effet, je ne l’avais pas emporté avec moi en vacances, et j’ai dû réinstaller Mac Os X suite à un remplacement du disque dur de mon Powerbook. Il me fut alors impossible de télécharger sur internet le contenu de ce CD. Je n’ai trouvé aucun driver pour la Mighty Mouse sur le site d’Apple. C’est assez déplorable…
J’en arrive à conclure que la Mighty Mouse est malgré tout une bonne souris, bien ancrée dans l’esprit Apple (avec tout ce que cela implique de bon et de mauvais), mais qu’elle ne vaut pas son pris de 55 euro. Pour ce prix là, vous pouvez avoir une Logitech haut de gamme bien plus évolué et de bien meilleure qualité. Les principaux défauts de la Mighty Mouse peuvent se résumer en une idée: l’utilisateur doit s’adapter à la Mighty Mouse, alors que cela devrait être l’inverse.
à Montpellier, le 29 octobre 2005.