Depuis quelques jours, la communauté P2P est en émoi: la RIAA a envoyé une lettre aux éditeurs des logiciels P2P les plus répandus, les menaçant de poursuites judiciaires sur le fondement de la jurisprudence MGM vs. Grokster de la Cour Suprême des Etats-Unis, s’ils ne se conforment pas immédiatement à son bon-vouloir.
Cette lettre a eu de lourdes conséquences sur les éditeurs de logiciels P2P, et par là sur toute la communauté mondiale de P2P. Néanmoins, le P2P n’est pas mort, et même s’il devient de plus en plus difficile à utiliser, il lui reste de beaux jours devant lui.
«D’abord ils vous ignorent, puis ils vous rient au nez, ensuite ils vous combattent, et alors vous gagnez» - Gandhi
Ils ont eu Napster et Grokster. Ils ont essayé de pourir eDonkey/Overnet et BitTorrent. Ils attaquent maintenant en masse: WinMX, Kazaa, LimeWire, Bearshare… que des noms connus ! WinMX vient de fermer. Kazaa est en très mauvaise posture. Bearshare silence radio. LimeWire annonce qu’à partir de maintenant plus aucun MP3 non signé (bref, non acheté) ne pourra être uploadé.
Mais 2 jours après cette annonce de LimeWire, un projet libre est né: FrostWire. Il s’agit d’un clone de LimeWire, avec les différences suivantes: il est gratuit (pas de version «pro»), il ne contient pas de pub, il ne limite pas l’upload. Bravo à l’équipe de FrostWire ! C’est comme ça qu’on avance: coupez une tête, deux repoussent. Les réseaux renaissent de leurs cendres. Les RIAA et MPAA ne peuvent définitivement rien faire contre ce qui devient un phénomène de société. Tout cela me fait penser à l’histoire des syndicats: interdiction, ignorance, légalisation, constitutionnalisation. Pour le P2P, on en est encore à l’heure de l’interdiction, mais les lois devront changer. Une loi qui s’oppose à ce vers quoi tend une société est une loi scélérate, elle doit être abrogée.
Quant à BitTorrent, c’est fini. Exeem, la succession du site de torrents SuprNova est un énorme échec. On peut prédire que la suite de BitTorrent sera également un échec: qu’on se le dise une bonne fois pour toutes, les clients P2P payants n’ont aucun avenir.
J’ai peut être tendance à dramatiser sur ce sujet, mais j’y vois une lutte entre, d’un côté ceux qui veulent faire de l’argent par dessus tout (cette mentalité commerçante exacerbée aux USA), et de l’autre côté ceux qui rejettent en bloc ces principes et qui croient en un Internet libre. En tout cas, Internet est en grave péril. Au début, il s’agissait d’un réseau de diffusion de contenu, avec des sites qui proposaient des choses interessantes. Maintenant que les sociétés commerciales ont mis la main sur cet outil, il est en passe de devenir le repaire de ceux qui veulent faire du fric à tout prix (sans jeu de mot, pour une fois…).
Mais ils ne gagneront pas, ¡no pasarán! Il y aura toujours des gens sur Internet pour défendre le libre. Il y aura toujours des sites sans pub, et à but non lucratif. Il y aura toujours des clients P2P libres, gratuits, open-source !
Pour ma part, j’utilise eDonkey pour les gros fichiers (DivX) et LimeWire pour les MP3. A partir de maintenant, je vais utiliser eDonkey exclusivement. Certes, son architechture n’est pas adaptée au partage rapide de petits fichiers (longues files d’attente), mais il a l’avantage de reposer sur un réseau décentralisé et indépendant du client. Je n’ai jamais eu de problème avec eDonkey/eMule, j’ai toujours trouvé ce que je cherchais. C’est actuellement, à mon humble avis, le meilleur réseau/client P2P disponible.
à Montpellier, le 28/09/2005
Mise à jour, 29/09/2005: les choses bougent vite en ce moment… j’écrivais hier cet article, et aujourd’hui la nouvelle vient de tomber: eDonkey ferme. Heureusement, on parle du logiciel et non du réseau. Les serveurs comme Razorback sont encore là -et espérons le pour encore un bon moment-, et les clients libres ou open-source comme eMule ou aMule continuent d’être développés, mais le client officiel n’est plus développé, et la société qui le distribuait ferme ses portes, après un discours de son responsable devant le Sénat américain.
Mise à jour, 04/09/2005: France Télécom continue son harcèlement intempestif au travers de Wanadoo. La boîte aux lettres est remplie d’offres Wanadoo, on me passe même des coups de fils pour me proposer de m’abonner à l’ADSL 8 Mbs. L’ADSL, ça va de plus en plus vite. Et les prestataires de connexion internet vendent des connexions de plus en plus rapides. Mais à quoi une telle vitesse peut-elle bien servir ? Entre un ADSL 1 Mbs et un 8 Mbs, la différence de temps dechargement d’une page type de taille moyenne est pratiquement invisible. Pour relever ses e-mails n’en parlons pas. J’ai beau chercher dans toutes les utilisations que je fais d’internet, je ne trouve rien d’autre que le téléchargement. Le téléchargement légal est bien entendu exclu, pour la seule raison que le contenu est pratiquement inexistant à l’heure actuelle. D’un côté on nous met en prison pour télécharger, et d’un autre côté on nous vend des débits de plus en plus rapides, pour télécharger encore plus. Mais, bien sûr, ce ne sont pas les mêmes… CQFD.